21

À l’heure du déjeuner, Whit s’assit dans un box à l’arrière du Café Caspian, le restaurant de sa nouvelle belle-mère, et se mit à observer les clients. Babe avait prévenu Irina que la population locale comptait de nombreux retraités de l’armée qui ne voudraient pas mettre les pieds dans un café russe. Whit pensait quant à lui que ces types défileraient chez Irina rien que pour l’admirer dans sa minijupe noire et son T-shirt blanc.

Le Café Caspian n’était rempli qu’au quart, en grande partie par des retraités, puis quelques agents immobiliers, quelques secrétaires, quelques artistes qui bavardaient en dégustant des spécialités russes comme des piroshki (petits pâtés à la viande), des golubtsi (feuilles de chou farcies à la viande) ou du bortsch accompagné d’une tonne de crème fermentée, de petits pains au miel et de blinis. Irina servait aussi des mets plus courants, comme de gros sandwiches au jambon, du poisson, des crevettes et des huîtres pêchées dans la baie, et aussi ce qu’elle appelait des « bitokes à la russe » : des hamburgers agrémentés de crème fermentée (évidemment), d’oignons et de noix muscade. Une spécialité qui connaissait un succès inattendu.

La décoration murale rendait hommage à la fois à la terre natale d’Irina et à son pays d’adoption : on pouvait admirer une belle photo couleur de la statue de la Liberté ainsi qu’un portrait de Pierre le Grand, des reproductions élégantes d’œufs de Fabergé et des poupées russes sur une étagère, une collection de drapeaux américains et texans sur une autre. Derrière la fenêtre étaient accrochés plusieurs panneaux : Whit Mosley – juge de paix. Irina, née sous le régime soviétique, n’en défendait pas moins la démocratie.

Une tasse de thé fumant à la main, Irina se glissa sur la banquette en face de Whit et repoussa ses cheveux châtains derrière ses oreilles. Elle avait des traits délicats. Whit s’était toujours imaginé les femmes russes comme des paysannes avec des fichus sur la tête, comme des mannequins pâles et anorexiques ou comme des nageuses olympiques gonflées aux stéroïdes. Mais Irina n’était ni trop grande ni trop fragile. Avec ses yeux bleu clair et sa bouche généreuse, elle avait l’air fraîche et en bonne santé.

Et elle prenait son rôle de belle-mère au sérieux :

« Aujourd’hui il faut que tu ailles faire campagne. Buddy Beere se balade en centre-ville dans un van couvert de pancartes.

— Il m’a proposé de débattre avec lui.

— Tu as accepté, bien sûr ?

— Non. Je suis trop occupé. Mais j’ai deux services à te demander.

— Dis-moi.

— J’ai besoin d’utiliser ton ordinateur.

— Pas de problème. Tout de suite ?

— Je préférerais ce soir, si ça ne te dérange pas.

— Aucun souci. »

« Pourquoi l’accent russe vous va-t-il droit à l’entrejambe ? » se demanda Whit. Peut-être qu’enfant il avait développé une fixation érotique malsaine sur le personnage de Natacha dans le dessin animé Rocky & Bullivinkle.

Irina sortit un trousseau de sa poche, en ôta une clé argentée qu’elle poussa de l’autre côté de la table.

« Un double. Ferme en t’en allant. Quel est l’autre service ?

— J’aimerais que tu deviennes proche de quelqu’un, mais en toute discrétion.

— Qui ?

— Elle s’appelle Velvet.

— On dirait le nom d’un cheval.

— Il s’agit d’une jeune femme, l’amie de l’homme qui est mort. Ce n’est pas une fille « classique », mais elle a besoin de quelqu’un à qui parler. Je lui ai donné rendez-vous ici pour déjeuner. Je vais te la présenter.

— Toujours à aider les gens dans le besoin, hein ?

— N’en parle pas à mon père. Il dirait que je ferais mieux de me concentrer sur la campagne. »

Irina fit un geste qui balayait tous les commentaires de Babe.

« Ne t’inquiète pas pour lui. Tu sais, parfois je crois que je suis la seule qui te connaisse vraiment. C’est idiot, n’est-ce pas ? Tu es un garçon délicat, Whit. »

Un garçon, alors qu’il était plus vieux qu’elle… Irina se pencha pour déposer une bise sur la joue de Whit.

Velvet entra dans le café. Whit lui fit signe de s’approcher, fit les présentations. Velvet, en bermuda et T-shirt jaune pâle achetés dans une boutique pour touristes, serra la main d’Irina et s’assit sans pouvoir détacher les yeux de la jeune femme.

« Vous êtes la belle-mère du juge Mosley ? Je devrais songer à aller recruter en Russie. Je fais des vidéos de formation, pour les entreprises. »

Irina sourit poliment, s’excusa et revint avec deux grands verres de thé glacé. Elle nota leur commande de salades et de « bitokes » avant de disparaître à la cuisine.

« Des vidéos d’entreprise… dit Whit d’un ton dubitatif.

— J’ai passé un marché avec Faith Hubble, lança-t-elle tout de suite. Bouche cousue quelque temps. Pour Sam. Pete n’aurait pas voulu qu’il souffre… même à cause de la vérité.

— Vous êtes si bonnes copines que ça, Faith et vous ?

— Je hais cette salope de tout mon cœur. Mais Sam est un gamin gentil. Je ne veux pas qu’il en bave encore plus. Cela dit, je ne les laisserai pas tirer le rideau sur Pete.

— Bon. Mais comment allez-vous ?

— J’ai suffisamment pleuré, dit-elle en haussant les épaules. Quand aurez-vous les résultats de l’autopsie ?

— Sans doute aujourd’hui, dit Whit en remuant son thé. Au plus tard demain. J’ai appris que Pete avait déjà fait une tentative de suicide, ce que vous avez oublié de nous dire.

— Ah, la fois où il s’est trompé de cachets.

— Une douzaine de cachets…

— Il les a pris parce que je ne lui ai pas confié de rôle dans un de mes films. On s’était disputés la semaine précédente, j’en avais marre de son côté prima donna. Alors il a avalé des tranquillisants et m’a appelé sur mon portable pour me demander de le conduire à l’hôpital. Je ne l’ai pas cru, et le temps que j’arrive chez lui il était dans les vapes. Autrement, je ne l’aurais même pas amené à l’hosto, je l’aurais fait vomir. J’ai déjà enfoncé mes doigts dans la gorge de pas mal de monde.

— On se suicide si souvent que ça dans le milieu ?

— Moins que chez les psys. N’imaginez pas que mes collègues soient tous fêlés. C’est loin d’être le cas.

— Non. Tout comme moi, vous êtes des citoyens modèles, parfaitement intégrés à la société. »

Whit avait voulu plaisanter gentiment, autant à ses propres dépens qu’à ceux de Velvet, mais il toucha un nerf déjà bien à vif.

« Ouais, aussi bien intégrés que les millions de citoyens modèles qui achètent nos films. »

Leurs salades arrivèrent, recouvertes de sauce au bleu. Velvet attendit que le serveur s’éloigne pour continuer :

« Vous ne vous imaginez pas la quantité d’insultes que j’ai entendues de la part de vos amis les citoyens modèles chaque fois que j’ai participé à des émissions de radio ou à des interviews sur le Web. Pute, salope… Tout ça ne veut plus rien dire pour moi. Je préfère me considérer comme une mécanicienne du plaisir », dit-elle avec un petit sourire.

Whit rit. Velvet en avait besoin.

« Comme ça, c’est moi qui choisis, Whit. “Salope” est un terme que les hommes ont inventé pour avilir la vitalité sexuelle des femmes. »

Velvet lécha le bleu sur sa fourchette en remuant sensuellement le bout de sa langue. Whit regarda autour d’eux, s’attendant à voir les retraités mâles tomber de leur chaise, victimes d’un arrêt cardiaque.

« Vous n’êtes pas à l’aise, Whit ? Qu’est-ce qui vous dérange ?

— Rien du tout.

— Oh si. Un gars comme vous a besoin d’un baiser qui tourne mal.

— Un quoi ?

— Dans un film traditionnel, dans neuf cas sur dix, le spectateur a le droit à un baiser et c’est tout. Ou alors les acteurs se frottent l’un contre l’autre, sous les draps, sans aucun réalisme. Une sexualité aseptisée. Dans un porno, on s’embrasse et deux secondes plus tard on passe aux choses sérieuses. J’appelle ça un baiser qui tourne mal. En réalité, c’est un baiser qui fait du bien. Vous êtes mon public idéal, vous savez. Un célibataire qui s’ennuie, trop respectable pour se payer une prostituée mais qui a quand même besoin de se soulager agréablement.

— Je ne m’ennuie pas, dit Whit en rougissant.

— Vous avez déjà vu un de mes films, Whit ?

— Non.

— Et un film porno quelconque ? Soyez honnête.

— Oui. Quand un de mes frères s’est marié, on a fait une fête pour enterrer sa vie de garçon. Quelqu’un a mis un film X.

— Si vous avez regardé, si vous avez bandé, vous ne pouvez pas me prendre de haut. À vous, à vos potes et à tous les mecs tristes et seuls de cette terre, j’apporte un peu de bonheur. Même dans cette gentille petite ville, dit Velvet en baissant la voix, je parie qu’on trouve mes films sous des tas de lits et au fond de nombreux placards. Plus souvent que vous ne l’imagineriez.

— Qu’est-ce que vous voulez que je dise, Velvet ? Que je vous félicite ?

— Non, je voudrais simplement que vous arrêtiez de vous comporter avec moi comme avec une pestiférée. Ma profession ne me cause aucune angoisse existentielle.

— L’angoisse que Pete ressentait au sujet de la disparition de son frère – est-ce vraiment cela qui l’a poussé vers le porno ?

— Il a fait du porno pour s’amuser, répondit Velvet d’un ton catégorique, sa fourchette figée au-dessus de l’assiette de salade.

— Pour s’amuser. Et vous, c’est la même chose ?

— Laissez tomber, on n’est pas chez le psy. »

Velvet attaqua sa salade, enfournant de grands morceaux de laitue imbibée de sauce.

« C’est juste que vous me semblez trop intelligente…»

Elle lui jeta un coup d’œil rapide.

« Vous croyez que le X est une industrie de crétins ? Sachez, mon p’tit juge, que j’ai bossé avec des informaticiens, des comptables, des avocats. Des gens qui se choisissent un pseudo le plus ridicule possible et font un film, une fois, histoire de rigoler. Vous pensez que ces gens-là valent mieux que moi parce que j’en ai fait des centaines ?

— Je me fiche de ces gens. C’est Pete, et vous, que je voudrais comprendre…

— Et si je vous dis que je pourrais faire de vous une star, ça vous tente ?

— Je ne pense pas que je serais extraordinaire devant la caméra.

— Vous avez une bonne mâchoire. C’est important, ça passe mieux à l’écran.

— Vous n’avez pas répondu à ma question : pourquoi vous ?

— Il n’y a pas de réponse toute faite. Je n’ai été ni battue ni violée, contrairement à ce que la plupart des filles racontent dans les talk-shows. Croyez-le ou non, je suis fille de pasteur. Mon père prêchait dans une église méthodiste à Omaha. Peut-être que j’y retournerai un jour, pour mener une vie plus tranquille. »

Velvet posa sa fourchette.

« Votre mère ? demanda Whit.

— Morte quand j’avais quatre ans. Lupus érythémateux.

— Je suis désolé.

— Je ne me souviens pas bien d’elle, sauf qu’elle faisait la meilleure tarte au citron du monde. Pendant qu’elle cuisinait je restais assise par terre, j’attendais qu’elle me laisse lécher la cuillère. Et elle aimait les gardénias. Avant sa mort, la maison sentait toujours le gardénia. »

Velvet appuya sa tête en arrière contre la banquette. « Mon père a épousé la secrétaire de l’église, uniquement pour que j’aie une mère. C’était une grosse vache méchante. Quand j’ai eu seize ans, mon père est mort d’un cancer. Il m’a dit juste avant de tirer sa révérence que cette femme et lui n’avaient couché ensemble qu’une seule fois. Après quoi, elle s’était toujours refusée à lui ; il faut dire qu’elle avait autant de sensualité qu’un raisin sec. C’est bien tout le problème ici-bas : pas assez d’amour, de bonheur, d’orgasmes.

— Ma mère est partie quand j’avais deux ans. Je ne l’ai jamais revue. Mon père s’est mis à boire, il a arrêté l’année de mes dix-sept ans.

— Ça alors, comment ça se fait que vous ne soyez pas vous aussi dans le porno ? Parce que rien n’est de notre faute et tout est de la faute de notre famille, n’est-ce pas ? Faux. Archifaux. Je n’en veux ni à ma mère, ni à mon père, ni à moi-même. Je voulais gagner beaucoup d’argent, je voulais faire des films et j’avais envie de m’envoyer en l’air. »

Whit imagina une petite fille assise par terre dans une cuisine qui sentait le citron et le gardénia. Des odeurs qui masquaient celle de la maladie.

« J’avais envie de faire une école de cinéma pour devenir une grande réalisatrice. Comme Coppola. Mais ça coûte cher, Whit, et je n’économisais pas assez en travaillant comme serveuse dans un bar ou en donnant des cours particuliers d’algèbre. J’ai rencontré un type qui m’a dit comment je pouvais gagner une belle somme en quelques heures. Je n’avais qu’à me choisir un pseudo et personne n’en saurait jamais rien… Je l’ai fait et j’ai continué. On se construit un monde et on n’en sort jamais.

— Ne dites pas que cela vous a surprise de constater que le porno vous empêchait d’embrayer sur une carrière normale. »

Velvet ne répondit rien. Whit demanda d’une voix plus douce :

« Qu’allez-vous faire une fois que Pete sera enterré ?

— Rentrer en Californie. Trouver un autre type bien monté qui arrive à bander pendant que quelqu’un tient une caméra à dix centimètres de sa bite et que cinq techniciens se curent le nez dans la pièce.

— Ne faites pas ça, Velvet. »

Elle sourit dédaigneusement.

« Oh, Whit, vous allez me sauver de cet univers maléfique, c’est ça ?

— Je crois juste… que vous pouvez faire autre chose de votre vie.

— Pourquoi êtes-vous juge ? demanda brutalement Velvet. Ça ne vous va pas du tout. Je ne peux pas imaginer que vous ayez assez d’arrogance pour juger les autres sans vous sentir mal à l’aise.

— Mon père m’a trouvé ce boulot. »

Velvet rit.

« Mais vous comptez le garder, non ? Et vous voulez être élu. Vous êtes un Gerald Ford de province, vous avez le boulot mais vous voulez réussir votre élection. Pourquoi y tenez-vous ?

— Je n’ai jamais voulu faire de politique, je déteste cet aspect-là des choses. Mais je crois que la vérité a de l’importance, y compris dans les petites affaires, y compris quand il s’agit d’infractions au code de la route.

— Et surtout quand quelqu’un meurt.

— Oui.

— Je ne vous crois pas, Whit. C’est le pouvoir qui vous branche. Ça se voit dans vos yeux, ils s’allument comme pour dire : “Ouais, je suis le juge, faites pas les malins avec moi.” Moi aussi, j’aime le pouvoir. Quand un type seul qui a besoin de se soulager met un de mes films dans le lecteur, c’est moi qui suis aux commandes. Il prendra son pied quand je le déciderai. Et vous, quand vous étiez gamin, avec cinq grands frères, vous deviez sûrement attendre votre tour avant de pouvoir aller pisser. Alors maintenant… Moi non plus, Whit, je n’ai pas envie d’abandonner le pouvoir que j’ai conquis. »

Les « bitokes » arrivèrent. Irina s’assit avec eux et demanda à Velvet si elle s’était promenée dans le quartier commerçant, si elle avait visité le musée d’art moderne et le musée de la mer. Velvet se montra tout d’un coup parfaitement courtoise, parfaitement sociable, cela avec une assurance remarquable. Avant de quitter la table, Irina posa sa main sur celle de Velvet et lui dit combien elle était ravie d’avoir fait sa connaissance.

Velvet se mit à tourner les pages de la carte des desserts sans vraiment y prêter attention.

« Qu’est-ce qui se passera si vous concluez au suicide… et que plus tard des éléments apparaissent prouvant que vous vous êtes trompé ?

— Je peux rouvrir le dossier, mener une nouvelle enquête. Mais étant donné que Pete a déjà fait une tentative de suicide, si l’autopsie pointe dans cette même direction…

— Je savais que vous vous défileriez. Politiquement, ce serait trop risqué pour vous de m’écouter.

— Je vous écoute, Velvet. Mais donnez-moi du concret. Est-ce que Pete savait quelque chose qui aurait pu lui coûter la vie ? » Velvet secoua vigoureusement la tête. « Vous croyez que j’arrive à dormir quand je me dis que l’assassin pense peut-être que moi aussi je sais quelque chose. Je ne sais rien. Rien du tout. »

Whit comprit à son regard que Velvet était terrorisée.

 

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